Les Clionautes s’associent au projet pédagogique du Convoi 77, une association autour du dernier convoi de déportés partis de Drancy vers les camps de la mort le 16 juillet 1944. En voici les principales caractéristiques après entretien avec Georges Mayer, président de l’association.
1) En quoi la démarche du Convoi 77 consiste-t-elle ?
Il s’agit d’écrire les biographies des 1315 déportés de ce convoi qui compte pas moins de 324 enfants. Pour l’immense majorité d’entre eux, nous ne disposons que de quelques bribes d’information: le nom, le prénom, la date de naissance, la date et le lieu de l’arrestation ou la dernière adresse connue. L’objectif est de combler les blancs dans ces histoires personnelles, en traitant et en croisant les sources d’abord, puis en rédigeant une biographie finale.
2) Quels sont niveaux d’élèves concernés ?
Principalement des élèves de Troisième et de Première, puisque la Seconde Guerre mondiale est au programme. Mais certaines classes de Seconde, voire des étudiants en licence ont rejoint le projet. Il va de soi que plus le niveau d’enseignement s’élève, plus le niveau de difficulté de l’exercice s’adapte : une biographie pourra être rédigée par une classe entière au collège, là où un étudiant pourra s’acquitter seul de la même tâche.
3) Combien de temps un tel projet prend-il dans l’année ?
Le projet s’adapte à chaque situation. Certaines classes, particulièrement ambitieuses, mènent les recherches et la rédaction pendant près d’un an mais d’autres n’y consacrent qu’un trimestre, souvent en début d’année pour coïncider avec les programmations autour de la guerre.
4) Y a-t-il des attentes spécifiques de longueur ou de présentation pour la rédaction de la biographie ?
Aucune. Cela peut être une demi-page ou 15 pages. Il n’y a pas davantage de règles formelles à respecter. Ce qui compte, c’est l’exactitude scientifique. Aux enseignants de choisir le format le plus adapté à leurs élèves.
5) Comment les enseignants font-ils pour trouver des sources à faire étudier à leurs élèves ?
Les sources sont multiples, qu’elles viennent des archives locales (bibliothèque municipale, mairie) ou régionales ou d’institutions comme les Archives nationales ou les Archives de la Préfecture de Police. Mais cela ne doit pas intimider l’enseignant. On ne lui demande pas de courir les archives. C’est là que l’association intervient auprès de nos partenaires institutionnels, soutient activement la classe, propose et facilite la transmission des documents. Par exemple, dans les cas où le déporté est né à l’étranger, l’association trouvera dans la ville d’origine du déporté une classe partenaire qui se chargera localement de rassembler les sources. L’association a même un partenariat avec l’AEFE pour que la vie des déportés nés en Égypte ou en Algérie puisse être mieux connue.
6) Comment choisit-on le ou les déportés que l’on souhaite faire étudier à ses élèves ?
Sur le site de l’association, une liste actualisée indique les déportés pour lesquels nous n’avons pas encore de biographie. Pour des raisons de simplicité mais aussi pour encourager l’ancrage local du projet, nous préconisons de choisir un déporté qui a vécu ou a été arrêté dans la commune ou la région de la classe. Mais cela n’a rien de contraignant, bien entendu.
7) Puisqu’il faut privilégier des recherches autour d’un déporté local, quelles sont les régions pour lesquels l’association a le plus besoin de trouver des établissements partenaires ?
Nous recherchons des établissements d’Île-de-France, de Lyon, de Marseille-Nice et de l’Est. Mais encore une fois, toutes les bonnes volontés sont les bienvenues.
8) Quelles démarches un enseignant intéressé doit-il entreprendre pour participer au projet ?
Il doit d’abord s’inscrire en ligne sur le site. Il est ensuite recontacté et un espace de travail intranet est créé pour faciliter la communication entre la classe et l’association. Sur le plan administratif, aucune autorisation n’est réclamée. Le projet a été lancé par la précédente ministre de l’Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem. Tous les rectorats sont parfaitement renseignés sur le bien-fondé et les détails du projet Convoi 77. Par ailleurs, le projet étant gratuit, aucun conseil d’administration n’a besoin d’avaliser quoi que ce soit.
9) Dans le maquis des projets possibles, qu’apporte celui du Convoi 77 aux élèves et aux enseignants ?
C’est un projet souple et innovant qui s’adapte à toutes les situations scolaires. L’enseignement de la Shoah est rendu moins vertical puisque les élèves participent activement au recoupage des sources et à la rédaction des biographies. Les enseignants qui ont participé au projet sont ravis de découvrir leurs élèves sous un autre angle. Les élèves montrent également un bon niveau d’adhésion. Il y a même des cas émouvants d’élèves qui ont réussi à mettre davantage de mots sur les expériences traumatiques qu’ils avaient pu vivre avant d’arriver en France.
Ensuite, ce projet est potentiellement interdisciplinaire et peut impliquer, outre les professeurs d’Histoire, les professeurs de Lettres, de Langues vivantes ou des disciplines artistiques. En effet, la forme de la biographie étant parfaitement libre, beaucoup de disciplines peuvent apporter une contribution.
Enfin, ce projet est européen. Les déportés viennent de 32 pays différents. Reconstituer des parcours aussi éclatés géographiquement est une rare opportunité offerte aux élèves.
10) Où l’enseignant intéressé peut-il obtenir de plus amples informations ?
Le plus simple est de se rendre sur le site internet du projet : http://www.convoi77.org/
Par ailleurs, une journée de formation au Mémorial de la Shoah à destination des enseignants est prévue pour le 24 avril 2019.